VSS : entre surmédiatisation et oubli généralisé
Des procès emblématiques et surmédiatisés
À Albi, le palais de justice n’a pas désempli pour le procès de Cédric Jubillar, dont la couverture médiatique a été exceptionnelle. Avec près de 300 journalistes accrédités, l’occupation médiatique de l’affaire a été quasi totale malgré une actualité nationale chargée.
Même effervescence à Nîmes pour l’appel de l’un des condamnés de l’affaire dite « Mazan », un an après le procès historique de la cinquantaine d’hommes qui ont violé Gisèle Pélicot. On se rappelle alors des journalistes qui faisaient la queue devant le tribunal pour avoir une place, la présence des médias étrangers, les images de Gisèle Pélicot et de ses enfants, sortant fièrement du tribunal sous les applaudissements.
Si ces affaires bousculent les esprits et mettent en lumière les violences faites aux femmes, leur visibilité n’est pas la norme, et la question du traitement des victimes continue de poser question.
Starification des auteurs et disparition des victimes
Lorsqu’il y a procès, la lumière se porte malheureusement souvent sur l’accusé plus que sur la ou les victimes. En premier lieu parce qu’elles ne sont souvent plus là, mais aussi en raison d’une certaine fascination, voire d’une empathie pour les auteurs de violences.
Actu Juridique revient dans son article sur le meurtre en 1980 par le philosophe Louis Althusser, de sa femme, Hélène Legotien Rytmann, sociologue et ancienne résistante. L’affaire expose parfaitement l’invisibilisation des victimes. Le meurtrier, véritable icône intellectuelle des années 1960, est victimisé alors que sa culpabilité ne fait aucun doute. Sa femme quant à elle, semble totalement effacée.
On retrouve le même mécanisme dans l’affaire Jubillar. La Dépêche du Midi assume avoir fait ce choix : « Nous avons décidé de ne pas en faire [des violences faites aux femmes] un sujet principal dans ce dossier et ne pas employer le terme de « féminicide » pour ne pas que cela nous porte préjudice par rapport à certaines sources. » explique Christophe Rauzy, rédacteur-en-chef adjoint du média.
Et souvent, aucune poursuites
3,2%. C’est le taux de plaintes pour viol qui ont donné lieu à des poursuites en 2023 d’après le dernier rapport du HCE (Haut Conseil à l’Égalité entre les femmes et les hommes).
Sous l’impulsion du mouvement #MeToo, les plaintes pour viol ont quant à elles doublé entre 2016 et 2024.
Alors pourquoi aussi peu de poursuites ? Le HCE pointe des lacunes persistantes dans l’accueil de la parole des victimes avec une « minimisation » des faits rapportés, de même qu’un manque de rigueur dans les enquêtes.
Dans sa série de recommandations, le HCE souligne l’importance et la nécessité de renforcer des structures comme nos Maisons des femmes ou les UMJ (Unités Médicos Judiciaires). Dans nos Maisons, les victimes de violences sexuelles notamment sont accueillies pour les soigner et recueillir les preuves de leur agression, et ce, sans obligation de dépôt de plainte. Ces preuves sont conservées jusqu’à 3 ans dans le cas où la victime souhaiterait entamer des démarches ultérieurement.
Par ailleurs, nous formons les forces de polices à l’accueil de la parole des victimes, afin de garantir une meilleure prise en charge et d’éviter les violences secondaires.